
Secrétaire général du groupe Klépierre, Julien Goubault voit dans notre besoin éperdu de reconnexion à l'autre, une clé de lecture singulièrement pertinente pour travailler la conduite du changement au quotidien, par temps de crise sanitaire. Entre la digitalisation, en interne, des interactions avec ses collaborateurs, et la banalisation du e-commerce qui a bouleversé l'activité des centres commerciaux, il réfléchit à de nouveaux leviers de création de lien social, ancré dans les territoires, pour penser un avenir a priori phygital mais résolument humain
Dans le podcast « Share Your Voice » du Club des Annonceurs, réalisé pour notre rubrique Les Marques en Mouvement, écoutons-le livrer sa lecture des grands enjeux de réinvention - en cours et à venir – du monde de la communication.
Quel est votre parcours ?
J’ai fait plusieurs métiers assez différents. Pour résumer, disons que mon parcours se divise en deux parties. Une première, dans l’administration, essentiellement centrée sur les finances publiques et l’audit. Et une seconde partie de carrière, en entreprise, dans le secteur immobilier, d’abord chez Icade puis chez Klépierre qui est le leader européen des centres commerciaux, un groupe qui possède et qui gère une centaine de centres commerciaux dans une dizaine de pays en Europe.
Je suis rentré chez Klépierre comme directeur de la communication il y a près de 5 ans, ce qui m’a d’ailleurs amené à rentrer au Club des Annonceurs. Et je suis aujourd’hui le secrétaire général de Klépierre, une fonction qui couvre les ressources humaines, les affaires juridiques, la communication, les systèmes d’information et la RSE.
Quelle est votre vision du changement ?
En lien avec votre métier et votre fonction, quel est le "move" actuel au sein de votre entreprise ?
Certains ont pu dire : « le changement c’est maintenant ». Sans vouloir faire de politique, ce n’est pas tout à fait ma vision du changement, celle du grand soir, celle de la bascule. Je ne crois pas non plus, à l’inverse, à la succession infinie des changements, à l’injonction au changement permanent, où l’on passe d’une mode à une autre. Je vois plutôt le changement comme une attitude : une capacité à faire bouger les choses sur le long-terme avec un horizon lointain, une ligne directrice claire et des convictions. C’est pour cela que j’aime bien cette notion de "Move" qui est votre fil rouge : avoir un but, un chemin et être en mouvement pour y parvenir.
Dans mon métier, le plus gros move ça a été de repenser la communication interne pour en faire un outil de lien social. La communication interne, c’est traditionnellement plutôt descendant. On la réoriente pour qu’elle soit plus transversale. La pandémie nous a beaucoup éloignés les uns des autres, en entreprise notamment, à cause du télétravail. Et en ce moment, avec nos équipes nous avons passé beaucoup de temps et nous continuons à passer beaucoup de temps à retisser le lien entre collaborateurs. Ce n’est pas facile mais c’est essentiel. On crée des événements, des espaces de communication entre les gens, on repense les contenus en ce sens pour connecter les gens.
En lien avec votre marque, quel est le move le plus important - actuel et à venir ?
Le "move" de notre marque — ou plutôt de nos marques, parce que chez nous, les stars ce sont nos centres commerciaux qui sont chacun une marque — c’est le retour du territoire, le primat du local. Cela fait déjà quelques années que la mondialisation a généré, par réaction, chez beaucoup de personnes, une envie de se reconnecter à son territoire, à une identité locale par peur d’une uniformisation globale où tout serait dilué, pareil. Les centres commerciaux ont pu incarner cette tendance à l’uniformisation : car finalement rien ne ressemblait plus à un centre commercial qu’un autre centre commercial, même dans un autre pays, même à 2 000 km l’un de l’autre. Depuis quelques années maintenant, nous redonnons à chaque centre ce qui fait sa spécificité et nous faisons en sorte qu’ils soient connectés à leurs territoires.
En lien avec votre marché, quel move rebat les cartes ?
Ce qui rebat les cartes dans notre secteur, c’est assurément la montée en puissance du commerce en ligne, et plus généralement les nouvelles habitudes de consommation. Et ce n’est pas facile de dire comment les choses vont évoluer. Parce que d’un côté, les ventes en ligne continuent de progresser (c’est tellement pratique), mais de l’autre, il y a beaucoup d’interrogations sur le modèle de société et l’impact environnemental du commerce numérique (les entrepôts, les livraisons aller et retour, les datacenters et leur consommation énergétique, la protection des données). Sans compter le besoin de contact humain qui est primordial et dont on a redécouvert l’absolue nécessité avec la pandémie. Donc je pense qu’on va arriver rapidement à un point d’équilibre où le commerce physique aura toute sa place, y compris les centres commerciaux qui sont des lieux de rencontres.
Que faites-vous pour contribuer à ce changement ?
Professionnellement, je m’efforce de maintenir un maximum de contacts. De multiplier les rendez-vous d’équipe, même sans agenda, simplement pour la convivialité.
À titre plus personnel, j’essaie aussi de garder un maximum de contact pour éviter le repli sur soi.
Quelle serait, selon vous, la véritable contribution des marques aux transformations environnementales ?
De passer d’une logique de sensibilisation à une logique d’impact. Les marques ont eu tendance à dire à leurs clients ce qu’ils devraient faire, ce qu’il est bon de faire pour la planète, plutôt qu’à se changer elles-mêmes. Mais les choses évoluent aujourd’hui parce que la pression sur les entreprises augmente. Et c’est tant mieux pour qu’elles prennent leur part de responsabilité dans la lutte contre le changement climatique. Les marques parlent davantage d’elles-mêmes, de ce qu’elles font concrètement pour limiter leur empreinte environnementale.
Quel est votre grand projet en 2021?
Bâtir l’identité d’employeur de Klépierre. Dans la marque, il y a la marque corporate, il y a la marque client, mais il y aussi la marque employeur. Et c’est important de la construire en cohérence avec les autres. Pour être crédible vis-à-vis de tous les collaborateurs de l’entreprise, pour créer de l’engagement, et évidemment aussi vis-à-vis de l’extérieur, des candidats, pour créer de l’envie, pour attirer. C’est l’un de nos grands projets pour 2021, parmi d’autres !
Pourquoi êtes-vous adhérent au Club des Annonceurs, qu’est-ce que cela vous apporte ?
Cela m’apporte quelque chose d’assez original, car c’est un club assez unique en son genre qui n’est ni un club métier, ni un club de secteur.
Ce n’est pas un club de secteur : on y rencontre des professionnels de toutes les industries, de l’assurance au ferroviaire, de l’agro-alimentaire à la tech, en passant par l’hôtellerie et l’énergie. C’est très riche d’échanger avec eux.
Mais ce n’est pas non plus un club de métiers, comme il y a des clubs ou des associations de DRH, de DAF, de DSI ou de Dircom. On y rencontre des professionnels de la marque. Donc on fait tous le même métier, mais en même temps, pas tout à fait. Parce qu’il y a des dircom, des directrices marketing, des publicitaires… Et c’est ce petit décalage, ces légères différences de point de vue qui vous font reconsidérer vos approches et vous donnent plein d’idées. Et puis, cherry on the cake, c’est un club où règne une ambiance hyper sympathique et qui organise des événements incroyables. Forcément, quand on est dans la com, on sait faire des events.
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