Des gens ensemble à distance

Et si la révolution se faisait dans le détail ?

Avec Extreme
© SolStock via Getty Images

Aussi bouleversante soit la crise que nous traversons, elle ne remet pas tout en cause. Elle questionne nos modes d’existence mais nous encourage également à poursuivre, de manière plus volontaire sans doute, certaines transitions en cours.

Par Jennifer Yadak, Strategy Designer chez Extreme 

Il nous arrive souvent de nous demander si, dans nos métiers de la communication, un récit mérite d’être lu avant d’être vu, ou si à l’inverse, mieux vaut d’abord le vivre pour l’interpréter ensuite. Alors que nous traversons une crise sanitaire inédite et tentons d’appréhender ses conséquences sociales et économiques, la question se pose de nouveau. Car force est de constater qu’on en a tombé des slides sur cette décennie de tous les défis : sur la nécessaire transformation permanente, sur l’indispensable empowerment individuel, sur la salutaire raison d’être. Et voilà qu’en pleine épreuve ces examens semblent disqualifiés, substitués par des aspirations à se réinventer et l’expectative du monde d’après. Face à l’inconnu, les incantations révolutionnaires sont irrésistibles… Mais tout n’est pas à jeter.

Capitaliser sur l’immatériel

Notre économie postindustrielle est une économie des savoirs qui repose de plus en plus sur des richesses intangibles (songez expérience). Sa mise en suspens impacte les capitaux financiers et plus encore les capitaux extra-financiers. Partout, les dispositifs de sauvetage mis en place (exemplaires en France, soit dit en passant) tentent de sauver les emplois. Mais qu’en est-il de la création, des savoir-faire et savoir-être, du savoir-vivre ensemble ?

Ces savoirs font la singularité de chaque entreprise, ils constituent leur principale force de création de valeur. Ces capitaux ne tiennent pas uniquement à des capacités financières (demandez à certains clubs de foot), c’est pourquoi des acteurs industriels de premier plan font de la culture d’entreprise et de l’apprentissage en continu des leviers de production et de transformation à part entière. Par temps de dispersion, un impératif vital donc : maintenir dans les entreprises le développement des savoirs les plus porteurs pour chacune.

Résister à la déliaison

Les grandes découvertes et avancées sont de nature collective ; voilà quelques temps que le mythe du génie individuel perd de son aura et c’est plutôt sain. Toute idée nouvelle est un lien, un lien créé par la connexion et la rencontre de différences. C’est ce que la révolution numérique a permis d’amplifier en offrant aux individus la possibilité de se réunir, au sein d’espaces propices au partage, à l’appropriation et à l’action.

Ces espaces et ce qui s’y produit sont bien réels, n’en déplaisent à ceux qui continuent de faire du virtuel un monde à part et moindre. Allez dire aux joueurs de e-sport que les émotions qu’ils ressentent sont artificielles, ou à des milliers de collaborateurs que leurs contributions à un projet stratégique mené en ligne n’ont aucune valeur. La numérisation de nos sociétés fait débat à juste titre, mais force est de constater que les technologies numériques, lorsque les individus y ont accès, offrent des capacités de socialisation, d’imagination et de création inouïes. N’ayons pas peur d’un grand remplacement automatique, il n’existe pas.

Susciter le devenir

C’est moins une transition qu’une condition pour les entreprises ; avoir une bonne raison d’en être, je veux dire, dans la vie des gens. À quel titre ce produit est-il entré dans leur intimité ? Au nom de quoi cette entreprise fait-elle leur fierté ? Ces dernières semaines, les initiatives sociales et solidaires des marques, populaires comme discrètes, rappellent que la consommation est l’ultime grand récit capable de changer les comportements et d’inspirer les manières de vivre en communauté.

Le rang auquel se sont élevées ces entreprises les oblige. Elles doivent illustrer sans détours, avec clarté et sincérité, le rôle qu’elles ambitionnent de tenir dans la société. Pas de rôle à jouer ? Pas de légitimité à perdurer. Aussi la crise actuelle représente une opportunité sans précédent pour convoquer dès à présent dans chaque entreprise des « États généraux »  : pour réunir les parties prenantes constituantes, inscrire cet événement dans la mémoire collective et statuer sur sa participation à la prospérité du monde.

Au fond qu’importe si l’image précède le texte ou si l’analyse suit l’expérience, pourvu que la lecture se fasse entièrement : en marquant une pause, en revenant en arrière, en relisant attentivement le présent. Il n’y a qu’ainsi qu’une page peut se tourner.


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