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L'observatoire des marques dans la cité par Havas Paris et CSA

Havas Paris a pour vocation de sonder les mouvements d'opinion, dans une époque complexe qui n'exonère aucun champs économique ou sociétal de mutations, de ruptures et de nouvelles aspirations.

Havas Paris publie les premiers résultats de son nouvel outil « L’Observatoire des marques dans la Cité », qui s’attache à analyser les phénomènes les plus prégnants de cette ère post-RSE dans laquelle les entreprises s’engagent au service de la société de façon toujours plus forte et plus visible avec pour mise en regard, la façon dont les Français perçoivent les entreprises aujourd’hui. (sondage Havas Paris/CSA - janvier 2018*).

La discussion parlementaire prévue en France au printemps autour de la loi PACTE et de la place à donner à l’engagement sociétal dans le statut des entreprises avec la création du statut de « société à objet social élargi », s’inscrit pleinement dans cette volonté collective de lier plus clairement intérêt privé et intérêt général au cœur du modèle des entreprises.

Quand les marques entrent en Politique… Les Français expriment une envie profonde de Politique au sens premier du terme, mus par des aspirations au changement et à une transformation de la société. Frustrés ou déçus par la politique traditionnelle, ils comptent sur eux-mêmes mais se tournent aussi vers les entreprises pour prendre le relais et pallier le pouvoir jugé parfois défaillant des États. Ces derniers se voient déjà concurrencés sur un

certain nombre de sujets régaliens comme la loi, la sécurité et aujourd’hui la monnaie. Et les Français se disent que le poids économique, technologique et humain des entreprises est aujourd’hui incontournable pour porter des projets de transformation de la société. Ils circonscrivent néanmoins leurs attentes : les entreprises sont jugées comme crédibles et efficaces pour réduire le chômage, favoriser l’insertion des jeunes et l’égalité Homme/Femme et moins sur d’autres sujets, qui restent le domaine prioritaire de l’État. Les entreprises, de leurs côtés, n’ont pas attendu le projet de loi impulsé par Emmanuel Macron, pour agir pour le bien commun et la société. L’étude identifie ainsi 6 pratiques de la façon dont les marques et les entreprises agissent au profit de la Cité, des plus cosmétiques

aux plus structurantes depuis la simple posture de communication à la réorganisation de l’entreprise, en passant par la participation au débat public.

Une envie de politique citoyenne

Face aux taux d’abstention record observés dans la plupart des grandes démocraties occidentales et face au sentiment partagé que les gens ne s’intéressent plus à la politique traditionnelle, notre étude révèle de manière contre-intuitive une envie profonde de

politique, une aspiration à la politique avec un grand P et la volonté que celle-ci renoue à la fois avec le sens et l’efficacité de l’action.

Cette envie se manifeste dans 3 directions : Une profonde aspiration au changement et à la transformation de la société.

91% des Français sont ainsi convaincus « que les inégalités se creusent fortement dans la société », 80% que « la société ne va pas dans le bon sens » et 89% aspirent à ce que « la société se transforme profondément. »

Une frustration vis-à-vis des acteurs politiques traditionnels.

Le sentiment répandu que le monde politique est entré dans l’ère de la gestion, du management, de la Gouvernance au détriment du Gouvernement. Pour 74% des Français, les « hommes et femmes politiques n’ont plus de projet de société », 83% pensent « que les

hommes et femmes politiques ne pensent qu’à l’économie » et 69% « que les gouvernants se comportent de plus en plus comme des chefs d’entreprise. »

Une envie de participation des Français au changement et à la transformation de la société.

77% des Français sont ainsi « prêts à s’engager personnellement pour que les choses changent. »

Une attente de sens et d'efficacité des États vers les entreprises

Cette envie de politique se manifeste dans la volonté de voir les entreprises prendre le relais sur un certain nombre de sujets face à des États et des gouvernements jugés parfois défaillants ou en tout cas incapables désormais de tout gérer seuls.

60%* des Français pensent que « les entreprises ont aujourd'hui un rôle plus important que les gouvernements dans la création d’un avenir meilleur », 64%** « que c’est une bonne chose que les entreprises prennent part au débat public pour défendre les valeurs auxquelles elles croient » et 33%** « que c’est une bonne chose que les entreprises parlent de politique. »

Les États sont en effet challengés sur un certain nombre de pouvoirs régaliens dont ils détenaient jusqu’à maintenant le monopole : challengés sur la question de la loi avec la place prépondérante occupée aujourd’hui par les activités de lobbying, challengés sur les questions sécuritaires avec la montée en puissance des entreprises de sécurité privée, dans nos territoires ou sur les terrains de guerre, challengés évidemment sur la question de la monnaie et plus largement sur celle des transactions avec l’émergence des monnaies virtuelles et de la Blockchain.

65% des Français pensent ainsi que « les États et les gouvernements ont de moins en moins de pouvoir pour changer les choses » et 81% que « les États ont aujourd’hui plus que jamais besoin des entreprises pour les aider à transformer la société. »

A l’inverse, le pouvoir économique, financier, technologique et humain des entreprises n’a jamais été aussi central pour porter des projets de transformation de la société.

Pour 73% des Français, « les entreprises ont plus de pouvoir que jamais pour transformer la société. ». Apple pèse désormais à elle seule 900 milliards de dollars de capitalisation boursière, Samsung investit 14 milliards en R&D chaque année soit autant que l’État

français, Toyota est plus riche que la Grèce… et le Danemark a nommé cette année un ambassadeur pour représenter ses intérêts auprès des GAFA.

65% des Français disent que « les entreprises ont plus de temps que les gouvernants pour faire aboutir des projets de transformation de la société. ». Et ils sont 67% à penser « que les projets de société les plus ambitieux sont aujourd’hui portés par des chefs d’entreprise. ». Pour 63% des Français, « il faudrait que la France nomme un ambassadeur pour traiter avec les très grandes entreprises du numérique. » Enfin, 63% pensent « que les grandes entreprises seront à l'avenir de plus en plus traitées comme des États. »

Une nouvelle pensée politique

Que pensent ces chefs d’entreprise engagés, notamment ceux des grandes entreprises technologiques américaines ? Sont-ils plutôt libertariens ou plutôt sociaux-démocrates ? Ont-ils des valeurs et des idées communes ? Inventent-ils des schémas idéologiques nouveaux ?

Havas Paris a exploré ces nouveaux clivages politiques. Au-delà des pensées innovantes et disruptives que portent certaines entreprises ancrées dans la nouvelle donne technologique, digitale et sociale (ledgerism, retail activism, dataïsm, neopaternalism…), un consensus semble naitre autour d’un leitmotiv répandu : « making good while making money ». Cette idée qu’une entreprise performante peut aussi être une entreprise engagée, qu’elle peut continuer à rechercher le profit tout en menant des projets de transformation de la société. Contre toute attente dans un pays traditionnellement suspicieux vis-à-vis de la réussite des entreprises, les citoyens français partagent désormais cet avis.

86% de nos compatriotes déclarent « qu'une entreprise peut tout à fait se comporter de manière très responsable et éthique et cependant gagner beaucoup d’argent. », 80% pensent que « ce sont les entreprises qui se comporteront de manière éthique et responsable qui réussiront le mieux économiquement demain. » et 61% sont conscients de cette nouvelle donne idéologique quand ils affirment « j’ai l'impression que les entreprises sont en même temps de gauche et de droite. »

Les prises de position récentes de Laurence D. Fink, patron de Blackrock, le 1er fonds d’investissement mondial (6000 milliards d’actifs ! ) constitue à cet égard une avancée intéressante dans le monde des affaires et marque une nouvelle étape dans la redéfinition de la performance. Dans une lettre récente à ses clients, il écrit : « pour prospérer dans la durée, chaque entreprise doit non seulement fournir de bons résultats financiers mais aussi montrer en quoi elle apporte une contribution positive à la société » - mettant ainsi la pression sur ses entreprises-clientes pour qu’elles s’engagent.

Les entreprises jugées légitimes sur le chômage, l'insertion des jeunes et l'égalité homme/femmes

L’étude a interrogé les Français sur les problèmes de société sur lesquels ils estimaient que les entreprises pouvaient agir le plus efficacement. Ils sont 66% à penser que les entreprises ont un plus grand rôle à jouer que les États s’agissant de la lutte contre le chômage. 62% sur la question de l’insertion des jeunes dans la société. 55% sur la question de l’égalité hommes/femmes. Et 49% sur la question du réchauffement climatique.

À l’inverse, l’État est encore perçu comme plus efficace et légitime sur les questions d’intégration des populations immigrées (72%), d’accès à l’éducation (90%), de promotion du vivre-ensemble (68%) et de défense de la laïcité (87%).

6 moyens pour les marques et les entreprises de s'engager

« L’Observatoire des marques dans la Cité » s’est attaché enfin à analyser les différentes manières dont les marques et les entreprises s’emparent de la question Politique, aux États-Unis où le phénomène est sans doute plus marqué mais aussi en Europe et en France où des cas intéressants émergent. Elle identifie 6 pratiques, des plus cosmétiques aux plus structurantes.

1° Nourrir sa marque en préemptant un ton plus militant dans sa communication ou en s’appropriant les sujets de société qui font l’actualité

C’est par exemple Diesel qui produit en 2017 une campagne d’affichage signée « make love not walls » pour dénoncer le projet de mur de Donald Trump. Ici pas d’engagement profond de l’entreprise sur la question de l’immigration, pas de combat précis, mais une simple utilisation opportuniste d’un événement politique pour consolider son ADN de marque et faire parler d’elle. Opportunisme acceptable pour les consommateurs tant la marque nous a habitué par le passé à des prises de paroles chocs, provocantes et iconoclastes.

2° Emerger sur son marché

Sur le secteur des cosmétiques notamment, beaucoup de marques se sont créées ces dernières années sur la base d’une posture très militante, radicale, assumant un engagement féministe fort (Yuli, Illamasqua, Glossier…). C’est un moyen à la fois de se démarquer des leaders de la catégorie, parfois un peu sages sur le sujet mais surtout de séduire des consommatrices plus jeunes et plus engagées. La marque Beautiful Rights propose ainsi à ses clientes de reverser 20% du montant de leur achat à des associations féministes.

3° Porter un point de vue unique dans le débat public

Les marques ont de plus en plus envie de défendre les valeurs auxquelles elles croient et de le faire savoir. A titre d’exemple, de nombreuses marques ont pris la parole en publicité au moment du décret anti-immigration de Donald Trump pour défendre l’image d’une Amérique généreuse et multiculturelle (Budweiser, 84 Lumber, Johnny Walker…). Plus récemment, certaines entreprises européennes ont pris parti au moment du Brexit ou du référendum en Catalogne, choisissant leur camp et assumant les risques encourus en termes d’image, de réputation ou de sanctions financières (Ryanair, TV3, TMB..).

4° Mener des combats de société spécifiques et puissants

Certaines entreprises ne font pas que défendre des points de vue. Elles mènent aussi des combats de société hier préemptés par les institutions, en y consacrant des moyens financiers importants. C’est le cas par exemple de Starbucks qui a investi 250 millions de

dollars pour envoyer 5 000 jeunes salariés non qualifiés par an à l’université d’Arizona, prenant le relais d’un État providence « qui ne peut plus tout faire tout seul » selon son président Howard Schultz.

5° Penser et construire de nouveaux produits et services

L’engagement de la marque peut se traduire dans un discours, dans des combats concrets au service de la société. Il peut aussi s’incarner dans des produits, sous la forme d’un marketing engagé. C’est ce que Gillette a fait cette année. La marque a ainsi designé et produit le premier rasoir conçu exclusivement pour permettre à un aidant de raser quelqu’un d’autre que soi-même, une manière derendre tangible son engagement sur le sujet de la dépendance.

6° Repenser son organisation

Depuis 2014, PAPREC a mis en place de manière proactive une charte de la laïcité visant à interdire les salles de prières et la manifestation ostensible de convictions religieuses au sein de l’entreprise. Avec 4000 salariés de 58 nationalités différentes, la charte est aujourd’hui encore respectée dans l’entreprise. « Imposer une charte de la laïcité relève d'un acte militant. Sur ces sujets sensibles, le débat doit être constamment nourri » explique ainsi le Jean-Luc Petithuguenin, Président de Paprec.

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