
Privé de sa fête d’anniversaire pour cause de Covid-19, le guide gastronomique impertinent vient d’annoncer le lancement de son guide 2021. Mais après son rachat par Michelin et le départ de son fondateur Alexandre Cammas, l’esprit Fooding sera-t-il toujours de mise ?
L'esprit Fooding
Le terme de « bistronomie » créé par le critique gastronomique Sébastien Demorand en 2004, les premiers foodcourts l’été à Marseille, le côté clubbing des évènements Foodstock mixant bouffe et musique, l’avènement des femmes cheffes… sont autant d’innovations que la bible des foodies a initiées et démocratisées depuis sa création en 2000.
Le guide avait éclos à l’époque pour sélectionner toutes les adresses authentiques et sincères, qu'elles soient hyper créatives ou très classiques. L’objectif était d’accompagner une jeune génération de chefs soucieux de façonner une « cuisine débridée » et de s’émanciper de l’arrière garde gastronomique. « Comme le Michelin a sanctuarisé la gastronomie française, le Fooding a codifié la bistronomie. Leurs destins ont été liées », résume un ancien collaborateur, dans un article de Télérama.
Le nom étant né de la combinaison de « food » pour ce qu’il y a dans l’assiette et de « feeling » pour tout le reste, Le Fooding s’est très tôt targué de sentir le « goût de l’époque ». Il participera d’ailleurs à élaborer tout un tas de mot-valise (bistronomie qui rentrera dans le Petit Robert en 2015, faubeaurgeois…) mixer à des anglicismes pour coller à la « tendance du cool et du débridé ».
De l’idée novatrice, aux standards de l’époque
Alexandre Cammas expliquait vouloir « traiter d’un sujet culturel pour intéresser un public plus large que les gastronomes traditionnels ». Avec 6 millions de lecteurs, le succès a été au rendez-vous et c’est à coup de soirées mémorables au casting de stars et de chefs hors normes, que le guide s'est forgé un nom dans le cool. Le concept d’aller au restaurant comme on va en club était singulier pour l’époque jusqu’à ce que « la gastronomie tombe dans la pop culture », reprend son fondateur. Avec l’arrivée des « Top Chef », « Master Chef » en 2010 et l’émergence d’Instagram, les nouveaux influenceurs foodies ont eux aussi commencé à donner leur avis sur les meilleurs restos. Du côté restaurateur, le modèle du chef-artisan en tee-shirt arborant une barbe de 10 jours et proposant une restauration savoureuse et un menu unique dans une salle au décor brut, est devenu mainstream dans la capitale.
Et la pandémie n’a rien arrangé, remplaçant l’habituelle fête annuelle par la livraison à domicile de 250 paniers repas. Mais même si son fondateur s’en va, le nouveau propriétaire a donné des garanties pour la suite : « Michelin continuera de développer le Fooding, dans le respect de l’esprit insufflé depuis sa création (…). L’entité conservera sa marque de fabrique, son indépendance éditoriale et ses propres sélections d’établissements ».
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