Portrait

« On peut avoir un rôle dans la société quand on est une grande surface de bricolage », Jérôme Deligne, directeur marketing de Castorama

Castorama, la célèbre enseigne de bricolage, jardinage et aménagement de la maison inaugure un repositionnement stratégique qui se traduit notamment par le lancement d’une nouvelle plateforme de marque. Son ambition ? Accompagner et anticiper les besoins de changement des Françaises et des Français. Retour sur la genèse de ce changement de cap avec Jérôme Deligne, directeur Marketing et Communication chez Castorama. 

« Changer nous fait avancer », c’est la nouvelle signature de Castorama qui lance sa nouvelle plateforme de marque. La crise sanitaire en a-t-elle été l’élément déclencheur ?

JÉRÔME DELIGNE : La plateforme de marque vient structurer une stratégie. Ce n’est pas le caprice d’une marque bien installée qui veut se refaire une petite beauté. C’est une réflexion mûrie depuis au moins 18 mois, bien avant la pandémie. Le point de départ est simple. Il y a eu différents épisodes dans la vie de Castorama dans les dix dernières années. Entre ces épisodes mouvants et face à une concurrence qui n’a cessé de progresser, nous nous sommes retrouvés dans une situation charnière. La marque Castorama est certes très connue, mais nous avions un problème de qualification de cette notoriété. 

Comment est-ce que cela a impacté votre réflexion sur la nouvelle plateforme de marque ?  

Nous sommes partis d’un constat. Depuis 50 ans, nous avons toujours été une enseigne populaire, accessible, à hauteur d’hommes. On a contribué à inventer la grande surface de bricolage en France. De l’autre côté, on a la conviction que nos vies seront multiples, complètement délinéarisées. Quand on est une enseigne qui est capable d’accompagner les gens dans tous leurs changements, on a un rôle à jouer. Celui que nous nous donnons c’est d’être l’enseigne qui a le mieux décrypté cette vérité d’époque et qui essaie d’accompagner les gens sur les changements, de la manière la plus positive et responsable possible. La crise Covid a accéléré, voire même renforcé cette tendance de fond que nous avions captée. 

Vous l’avez rappelé, le changement de vie est devenu une préoccupation centrale de la vie des Français. En même temps, la maison, et on l’a vu avec le confinement, n’a jamais occupé une place aussi fondamentale, elle reste un refuge face aux bouleversements de la vie. Comment Castorama peut-il accompagner ces deux dimensions ?

La maison est tellement une valeur refuge que c’est la meilleure alliée du changement. Nous observons plusieurs tendances actuellement : les urbains qui veulent reconquérir les provinces, ceux qui souhaitent retrouver le plaisir d’avoir un jardin … Ce qui réunit tout cela, c’est la volonté de revenir dans sa maison, d’avoir un petit cocon de protection. Chez Castorama, vous pouvez simplement décider de mettre un coup de peinture pour remplacer celle du salon que vous ne supportez plus. C’est un petit changement qui peut tout changer. 

En 2020, le marché du bricolage a vécu une année hors norme. Le chiffre d'affaires du secteur est en hausse de 13%, un record. Comment interprétez-vous ces chiffres chez Castorama ?

À partir du moment où l’on s’est retrouvé dans nos maisons, il y a eu pour certains l’envie de s’occuper, et pour d’autres, ce fut l’occasion de faire ce qu’on a jamais le temps de faire, la porte qui grince ou le joint qui accroche en dessous de la fenêtre. Nous sommes convaincus qu’il y a toute une génération de nouveaux bricoleurs qui se sont lancés, qui ont osé des choses qu’ils n’auraient jamais pensé faire et ils y trouvent du plaisir. Nous avons été là pour accompagner cette envie en apportant de l’innovation, de la modernité, du service. Avec les drives, nous avons voulu nous adapter au plus vite. Les clients ont adoré. 

Vous avez justement entrepris une accélération de la digitalisation de l’enseigne. Comment cette stratégie peut-elle permettre de fidéliser cette clientèle nouvelle ? De comprendre au mieux leurs besoins ? 

Comme nos magasins étaient fermés en mars 2020, le seul moyen de garder le lien avec nos clients était le digital. Et le digital est l’ami des magasins ! D’ailleurs, les gens vont sur le site alors qu’ils sont en magasin. Grâce à notre application, vous scannez un produit et elle vous informe dans quelle allée il se trouve. L'omnicanalité est là, sur des sujets très simples. 

Parmi les nouveaux projets qui accompagnent la nouvelle plateforme de marque, il y a la création d’un Observatoire du changement que vous déployez avec l’institut de sondage ViaVoice. Quel est le but de cet observatoire et comment comptez-vous vous en servir chez Castorama ?

L’idée a été d’avoir ce petit coup d’avance sur la micro tendance qui peut se développer, sur un besoin qui n’a pas ou peu été exprimé et qui pourrait devenir une vraie problématique pour les consommateurs. Cet observatoire, c’est réunir ce que vivent nos équipes et collègues, mais on a besoin de le structurer pour le rendre pérenne. C’est aussi un rendez-vous avec les consommateurs car nous allons organiser deux ou trois sessions par an afin d’approfondir la relation qu’ont les Français avec leur habitat. Nous voulons avoir ce rôle d’accompagnateur de tous les changements, de les détecter le plus tôt possible dans le but d’irriguer toute l’entreprise avec ce que nous aurons pu déceler, observer, découvrir parfois. On n’est pas obligé d’être un laboratoire pharmaceutique pour avoir un rôle dans la société, on peut avoir un rôle dans la société quand on est une grande surface de bricolage. 

Vous avez mis au point une brochure de sélection de produits plus responsables. Jouer la carte de la transparence c’est un moyen de gagner la confiance des consommateurs tout en les accompagnant vers un mode de vie plus écologique ?  

Nous souhaitons accompagner les changements de manière positive et responsable, sans être dogmatiques. Les Français ont envie de réduire leur consommation d’énergie, d’avoir un impact positif sur la planète. Mais comme nous tous, ils ont un budget à gérer et donc ces deux sujets pourraient s’opposer. Nous essayons de réunir cela en déculpabilisant, en expliquant. Cette sélection de produits est un éclairage, une espèce de guide qui va par exemple, vous présenter l’utilité d’un robinet équipé d’un mousseur qui fait économiser de l’eau.

Pour porter ce repositionnement stratégique aux yeux du grand public, vous lancez une grande campagne publicitaire avec un film d’une minute trente, qui passe à la télévision. Dans ce film, on suit les aventures d’un père de famille qui déménage, rénove sa nouvelle maison avec ses deux enfants et se transforme en Castor. Expliquez-nous. 

Le castor partage une caractéristique avec nous les humains, c’est qu’il est ingénieur et architecte. Il améliore son habitat au gré des changements de sa vie. Nous avons essayé d’aller réveiller les nouveaux castors, ceux qui ont commencé ce mouvement avant le Covid et qui l’ont accéléré depuis. Nous voulons aller chercher ceux qui veulent se réapproprier leur maison, l’adapter, la changer, y être bien, la rendre responsable. 

On s’est tout de suite donné un objectif de singularité, d’originalité, on voulait créer un petit électrochoc. Je veux éviter le syndrome du “ce spot est sympa mais je ne me rappelle plus quelle est la marque qui est derrière”. Et nous espérons que les consommateurs vont adorer comme nous…

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