
42 milliards d’euros, c’est le chiffre d’affaires affiché par IKEA en 2021. Retour sur un modèle hors normes.
On vous parlait la semaine dernière de nouvelle économie de la proximité, et mardi du groupe Printemps qui refond à 360° sa stratégie pour refaire du magasin un lieu de vie. Cette fois-ci, attardons-nous sur un autre modèle de magasin, unique en son genre et qui a fait ses preuves : le cas d’IKEA.
Commençons avec quelques chiffres. En 2021, l’enseigne suédoise affichait un CA de 47,6 milliards de dollars (42 milliards d’euros). Au compteur, elle affiche 458 magasins dans 61 pays et peut se gargariser de 775 millions de visiteurs en magasin et de 5 milliards en ligne par an. On vous l’a dit : l’enseigne est unique en son genre. Au fil du temps, elle a brisé toute règle bien établie du retail.
Une seule voie tu emprunteras
Première entorse aux règles traditionnelles du retail : le parcours client. La plupart des commerces misent sur une expérience en magasin où le client a la sensation de pouvoir explorer à sa guise. Vous avez déjà essayé d’acheter une plante, une seule chez IKEA ? Avant d’arriver au rayon plantes, vous serez passé par l’espace fauteuils, canapés, cuisine, chambre etc. La plupart des magasins IKEA, explique un excellent article de The Hustle, disposent d’une surface de 300 000 mètres carrés. Cette surface ne peut être généralement parcourue que d’une seule manière, à sens unique et à travers une cinquantaine d’espaces. Une manière pour IKEA de donner à voir l’intégralité de son catalogue, contrairement à la plupart des magasins. Du reste, le client ne sait jamais à quoi va ressembler le prochain espace, ce qui le pousse à prendre des produits, soucieux de ne plus en trouver par la suite.
Confus, mais dépensiers
Cette approche d’envisager le magasin rappelle l’effet Gruen ou transfert de Gruen. Un phénomène psychologique où les consommateurs entrant dans un magasin, entourés par un aménagement peu conventionnel, en oublient leur but initial. Le résultat ? Plus d’achats impulsifs. Une étude du chercheur Alan Penn de la UCL (University College London) estime que 60 % des achats effectués chez IKEA relèveraient de l’achat impulsif.
Autre technique de l’enseigne – et de bien des retailers : l’effet de domination asymétrique ou effet de leurre. Imaginons qu’un premier meuble coûte 100 euros, son voisin, 70 ; la marque mettra en avant un troisième meuble qui n’est ni aussi bon marché que le deuxième, ni d’aussi bonne qualité que le premier. Résultat ? Le visiteur se rabattra sur les deux premières options. Une étude prouve que cet effet de leurre provoquerait une augmentation des ventes de l’ordre de 14 %.
« Par le pouvoir des boulettes de viande IKEA »
Enfin, IKEA tient à proposer des prix bas à toute épreuve. Des chercheurs de l’Université de Boston et de la Wharton School ont étudié plusieurs centaines de catalogues IKEA, poursuit The Hustle, émis dans 6 pays différents entre 1994 et 2010. Nombreux des produits auraient baissé de prix au fil du temps… Par exemple en 1985, la célèbre bibliothèque Billy se vendait pour 73 euros contre 45 euros aujourd’hui.
Last but not least : la nourriture. IKEA génère quelques 2,4 milliards de dollars par an grâce à la vente de produits alimentaires, représentant 5 % de son chiffre d’affaires. Mais surtout, l’enseigne garde plus longtemps le consommateur en magasin. Il mange et reprend ses courses. Et donc, dépense plus. En 2017, le COO Food d’IKEA, Gerd Diewald, déclarait ainsi que les boulettes de viande suédoises – il s’en vendrait 1 milliard chaque année – était son meilleur vendeur de canapés : « Lorsque vous nourrissez vos clients, ils restent plus longtemps, ils discutent de leurs achats et enfin, ils se décident à acheter, tout ça sans quitter le magasin une seconde. »
Participer à la conversation