
Head of brands du groupe ADP, Géraud Rabany voit dans la crise qui frappe de plein fouet l’aéroportuaire, l’opportunité pour le secteur de se réinventer et d’accélérer sa transformation écologique. Pour en finir avec les effets d’annonce qui retardent souvent le passage à l’action, il entend promouvoir un changement de culture global. Sa mission ? Embarquer et fédérer un maximum de parties prenantes autour d’un nouveau récit d’entreprise. Mais aussi, rebâtir une relation de confiance – sanitaire, mais pas que - aux usagers
Dans le podcast Share Your Voice du Club des Annonceurs, réalisé pour notre rubrique Les Marques en Mouvement, écoutons-le livrer sa lecture des grands enjeux de réinvention - en cours et à venir – du monde de la communication.
Quel est votre parcours ?
Je suis le Head of Brands du groupe ADP. À l’évocation d’ADP, on pense immédiatement à Paris Charles de Gaulle ou Paris Orly alors qu’en réalité, nous sommes le leader mondial de l'aéroportuaire avec 27 aéroports dans le monde comme Dehli, Santiago du chili ou Zagreb.
Head of brands, ça signifie que j'anime une équipe et un réseau qui s'occupe des stratégies de marque, de la publicité, du design de marque et des partenariats (culturels en particulier)
J'ai eu la chance de passer par des agences telles que W&Cie et Fred & Farid Paris qui m'ont appris le branding et la publicité. Mais j’ai également évolué chez l’annonceur aux côtés de Transdev, le leader mondial du transport public avant de rejoindre le groupe ADP à Paris. Du B2B au B2C en passant par le conseil et l’accompagnement de grands groupes, mon parcours est profondément mixte : je n’aime pas trop les cases !
Quelle est votre vision du changement ?
En lien avec votre métier et votre fonction, quel est le "move" actuel au sein de votre entreprise ?
Le secteur pour lequel je travaille traverse la pire crise de son histoire. C'est ni plus ni moins que sa survie qui se joue. Dans une crise de cette ampleur, la vraie difficulté, c'est de faire évoluer son activité pour contribuer aux enjeux de transformation, alors qu'avant notre métier, c'était plutôt de nourrir la croissance.
C'est en réalité une opportunité géniale pour les brand managers de contribuer aux repositionnements stratégiques et industriels des boîtes. En clair, la marque et ses outils sont souvent des éclaireurs. Nous n'opérons pas le changement mais nous en éclairons le sens, et nous montrons la marche à suivre en assumant le récit à venir et c'est passionnant.
C'est aussi l'occasion de remonter auprès des directions générales sur les dimensions de contribution à l'identité, au sens profond. Qui sommes nous ? Que disons-nous alors à nos publics etc… Ce qui pouvait être perçu comme de la cosmétique (malheureusement parfois à raison) devient maintenant une contribution clé pour ceux qui n'en étaient pas convaincus.
Je suis réservé sur la « raison d'être » qui est un sujet très complexe à traiter en vérité. Regardez le cas d'Emmanuel Faber… La marque a cette chance de pouvoir à la fois être un levier stratégique de changement et un actif "léger" dans la culture économique.
En lien avec votre marque, quel est le move le plus important - actuel et à venir ?
Franchement, la seule chose dont je suis sûr, c'est que l'aviation va devoir réussir sa transition écologique. Et nos marques aéroports vont contribuer à la fois à projeter ce changement et à illustrer ce mouvement qui ne sera réel que s'il est rapide. Pour le reste, l'année passée nous apprend à nous méfier des « Jean-Michel Boule de Cristal « qui peuplent les panels…
En attendant nous nous battons pour gagner la bataille de la confiance. La dimension sanitaire est là pour durer, exactement comme la sécurité anti-terroriste dans les années 90 puis post 2001. Cela devient une norme et nous travaillons dur sur ces sujets avec nos marques qui complètent la promesse des compagnies aériennes.
En lien avec votre marché, quel move rebat les cartes ?
La transition écologique encore, évidemment. Ça change tout. Et c'est aussi une chance car sans le choc vécu actuellement par l’industrie, je ne suis pas certain qu'elle aurait su se mettre en mouvement comme elle fait en ce moment. Tout reste à prouver bien sûr mais il s’agit de reconnaître les aspects positifs du séisme en cours.
Que faites-vous pour contribuer à ce changement ?
Nous avons différents niveaux de réponse, mais d’une part, la marque endosse les innovations et les transformations sur les sujets de confiance sanitaire et de transition écologique. De l’autre, nous travaillons avec les opérations et la RSE chez nous pour faire infuser cette culture et pour produire des preuves concrètes. Cela va mettre un peu de temps avant d'être communicable mais ça avance. Enfin, nous participons aussi aux réflexions sur notre métier en lui-même, à la fois sur l'impact culturel de nos communications et de nos publicités en particulier. A ce titre, nous avons rejoint l'alliance Publicité et transition écologique des modes de vie de l'EPE pour faire de la pub un levier positif de transformation des usages. Nous n'avons pas les mêmes contraintes que les 10 premiers annonceurs du CAC mais nous avons en commun d'avoir sous la main une belle opportunité de transformer notre métier.
A titre personnel, cela implique aussi une forme d'exemplarité managériale qui n'est pas sans exigence. Mais en pleine crise, je ne vois pas bien comment faire autrement pour leader les équipes vers la contribution volontaire à de tels enjeux.
Quel est votre grand projet en 2021 ?
Ah-ah surprise !
Quelle serait selon vous la véritable contribution des marques aux transformations environnementales ?
Ah j'en ai déjà pas mal parlé non ? (rires)
Pourquoi faites-vous ce métier ?
Parce qu'on travaille tous les jours avec différents langages. On parle en plusieurs langues bien sûr, mais ça recouvre aussi le langage formel du design ou du craft, le langage conceptuel de l'idée publicitaire, le langage gratuit et emphatique de la culture etc…
Comme je travaille dans un réseau mondial très divers, je suis tous les jours frappé par la puissance et la fragilité des langages en général, quels qu'il soient. C'est un bien précieux qui dépasse la simple pratique économique. Et les communicants ont la chance et la responsabilité de les nourrir, de les faire vivre et, par là même, de les protéger. Oui, j'avoue c'est un peu ridicule de grandiloquence, mais c'est un vrai moteur en fait !
Pourquoi êtes-vous adhérent au Club des Annonceurs, qu’est-ce que cela vous apporte ?
Comme son nom l'indique, c'est un club. Pas un syndicat. J'apprécie particulièrement la dimension informelle d’entraide entre membres. Nous bossons pour des marques très différentes mais nous avons des préoccupations communes et les différentes opportunités que nous offre le club nous permettent d'échanger, de nous nourrir de manière très souple et très riche.
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