
À l’occasion de la COP26 sur le climat, qui a lieu jusqu'au 12 novembre à Glasgow, l’association Entreprises pour l’Environnement (EpE) publie un guide « Représentations des modes de vie et transition écologique » pour accompagner les entreprises dans cette mutation culturelle.
10 stéréotypes de modes de vie en publicité
Ce guide vise à mettre en lumière 10 stéréotypes parfois présents dans la publicité, ancrés dans notre inconscient, tantôt bénéfiques, tantôt dommageables pour la planète, pour contribuer à l’évolution de nos habitudes et faire émerger de nouveaux modes de vie.

L’objectif du guide est ainsi d’inspirer et d’ouvrir vers de nouveaux imaginaires, en identifiant, évitant ou promouvant certaines représentations, en fonction de leur compatibilité avec un avenir durable.

À l'occasion de la sortie du guide, Claire Tutenuit, Déléguée générale d’EpE, revient sur le rôle des entreprises et des communicants dans la transition écologique.
Quelle est la mission d’EpE ?
Depuis 1992, les membres d’EpE, grandes entreprises françaises et internationales de tous les secteurs de l’économie, trouvent intérêt à travailler ensemble pour mieux intégrer l’environnement à leurs stratégies et leurs opérations. EpE anime leur réflexion collective, en organisant des échanges de bonnes pratiques, des dialogues réguliers entre eux, avec la communauté scientifique, avec des parties prenantes très diverses, voire en structurant des engagements volontaires. Nombre de ces réflexions sont formalisées dans des publications et recueils de bonnes pratiques qui sont mises à disposition de tous les acteurs. Ce travail couvre tous les domaines de l’environnement : climat, biodiversité, santé environnementale ; de plus en plus les membres travaillent à associer les différentes fonctions de l’entreprise à la transition écologique, en ligne avec les stratégies : RH, finance, et maintenant marketing et publicité.
Comment est née l’idée de ce guide à l’usage des communicants ?
Elle est née de l’étude ZEN 2050 – Imaginer et construire une France neutre en carbone en 2050 – publiée en 2019, qui a fait émerger l’idée que cette transition est possible, et compatible avec des modes de vie confortables et diversifiés, à condition que les citoyens, également consommateurs, salariés, épargnants et électeurs y participent activement aux côtés des pouvoirs publics et du monde économique, y compris avec certains changements dans leurs modes de vie, habitat, mobilité, alimentation, au-delà des petits gestes dorénavant bien connus. Or les entreprises ont à travers la publicité une forte capacité à influencer les représentations que se font les publics de leur « vie rêvée », les désirs et les références qui orientent nos choix. L’une des recommandations de ZEN 2050 était précisément de réorienter la publicité pour faire évoluer les habitudes de consommation vers des modes de vie durables.
Jusqu'ici nombre de messages au grand public se sont concentrés sur les « petits gestes » : moins de gaspillage, tri des déchets, manger local et de saison… L'originalité de ce guide est qu'il aborde des décisions plus importantes ou permanentes : Où habite-t-on, quel trajet domicile-travail, où passer ses vacances, comment se nourrir... Si les ONG ont déjà commencé à évoquer ces changements, ils sont plus nouveaux dans le discours.
Quel rôle peut jouer selon vous la communication commerciale sur nos représentations ?
Au-delà des produits et services promus, la publicité montre des situations de vie désirables, elle projette et véhicule donc des représentations, consciemment ou non, qui à la longue constituent des références sociales fortes. Nombre de ces références sont issues des trente glorieuses, et du mode de développement de cette époque. En en ayant pris conscience, la filière communication peut mobiliser son talent créatif et faire émerger de nouveaux imaginaires plus compatibles avec la transition écologique et les limites de la planète. Elle peut aussi imaginer et apporter des réponses aux questions que se posent de nombreux ménages sur les nouveaux modes de vie de la transition.
Alors que la pandémie nous laissait entrevoir la promesse d’un monde moins pollué, un nouveau rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) constate déjà un rebond des émissions mondiales de CO₂. La relance économique l’emporterait-elle sur la transition écologique ?
Il y a manifestement un élan de rattrapage, et notamment la reprise des activités économiques, de même que des familles qui ne se sont pas vues depuis longtemps veulent se retrouver, etc. Mais nombre d’habitudes ont été changées : le télétravail est là, et aura peut-être des effets sur les émissions des déplacements – si les personnes n’accroissent pas la distance entre leur domicile et leur travail. Plusieurs plans de relance, notamment en France, ont aussi dédié des financements importants à la transition écologique.
Quel rôle les pouvoirs publics doivent-ils jouer concernant la transition écologique ? Pour le militant écologiste Cyril Dion, « sans régulation publique, les actionnaires court-termistes continueront de faire passer le profit au-dessus de l'urgence sociale et climatique ». Partagez-vous son point de vue ?
L’étude ZEN l’a aussi montré : le rôle des pouvoirs publics est essentiel dans la transition, à la fois pour des régulations, pour inscrire la transition dans le récit national, et pour assurer une transition abordable aux ménages et entreprises les plus vulnérables. Les régulations servent bien sûr à intégrer le climat dans les priorités des acteurs économiques, notamment par le prix du carbone, ou par des régulations comme l’interdiction de vente, à terme, des véhicules thermiques, ou les normes d’émission des logements et véhicules.
La presse a révélé il y a peu que Total, Elf ou encore Exxon étaient au courant des risques de leurs activités sur le climat. Pensez-vous qu’aujourd’hui, nous sommes face à un moment de transparence des entreprises ?
Le climato-scepticisme est en effet, heureusement, derrière nous. La transition est difficile pour certains acteurs, elle est compatible avec l’activité économique, mais pas avec la croissance en volume de chaque secteur. Identifier et anticiper ces difficultés est une façon de les résoudre plus facilement, qu’elles relèvent de la transformation des emplois, ou de changements de prix des produits et services, donc des business models. Le dialogue avec les consommateurs sur ce que seront les nouveaux modes de vie fait partie de cette nécessaire transparence, et la publicité pourrait le faciliter.
Consciente de l’importance de la nécessaire transformation de nos modes de vie, EpE a créé en 2020 l’Alliance Communication Commerciale et Transition Écologique des modes de vie (ACCTE), un groupe de travail qui réunit des Directions du développement durable et des Directions de la communication autour d’une question essentielle : l’influence de la publicité sur l’évolution des modes de vie nécessaire à la transition écologique. Le guide « Représentations des modes de vie et transition écologique » est un premier produit de cette réflexion, à destination des communicants.
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