
Alors que le soulagement des restrictions sanitaires et la campagne de vaccination continuent, la pandémie aura été propice au développement de nouvelles formes de mobilités et de manière d’envisager le voyage. De l'escapisme au tourisme régénératif en passant par la micro-aventure, les expériences évoluent.
Par Virginie Lorenzato Joannis, CEO du Groupe Caramel
Escapisme : digitalisation du voyage à la maison
Privés de sortie, nous avons découvert le divertissement à distance : concert, presse, visites de musées etc... La culture et le divertissement sont entrés dans des mondes virtuels pour nous offrir des sources d’évasions expérimentales. Normalisation du gaming et du voyage immersif, l’escapisme s’est aussi manifesté dans la mode et l’alimentaire.
En mode, l’engouement pour l’outdoor témoigne de ce profond désir d'évasion au travers de vêtements techniques et fonctionnels, adaptés aux environnements sauvages. Fin 2020, la campagne Gucci x North Face n’hésitait pas à esthétiser et romantiser l’aventure du plein air, offrant une fiction désirable propice à une demande bien latente durant la période de confinement.
En alimentaire, le voyage gustatif à portée de chez soi s’est également manifesté : aussi bien vers des saveurs lointaines que des saveurs anciennes venant de notre enfance.
En rétrospective, le voyage s’est relocalisé à l’instar du « staycation », ces vacances passées à la maison. Mais c’est également un changement d’échelle pour notre mobilité qui s’opère.
Mobilité de proximité : la pensée du local
En 2020, on notait dans le même temps la chute des immatriculations dans l’automobile et l’envolée de la fréquentation cyclable en France (+44% selon Vélo et territoires).
Les espaces urbains et ruraux deviennent de plus en plus poreux, avec des citoyens qui cherchent à améliorer leur qualité de vie et quittent les grandes métropoles pour de plus petites.
En somme, ce recalibrage favorise l’émergence d’une mobilité de proximité, où l’individu cherche à vivre des expériences accessibles, rapidement proche de chez lui, lui permettant de se reconnecter avec le territoire qu’il habite. Cette attente se reflète également au travers de la demande de produits locaux et « made in France » qui ne cesse de croître.
Cette nouvelle mobilité de proximité risque de se poursuivre sur les prochaines années et impactera notamment le voyage avec l’engouement pour les micro-aventures, ces échappées qui souhaitent ramener du sens dans les voyages devenus trop touristiques.
Micro-aventure : le voyage accessible et spontané
Devenu une commodité ou un phénomène de masse idéalisé sur les réseaux sociaux, le voyage et son récit sont à réinventer. Dès la fin du printemps, les flux de photographies d’environnements idylliques inondent les réseaux sociaux et les consommateurs de ces contenus éprouvent rapidement l’anxiété de ne pas pouvoir accéder à ces idéaux paradisiaques. Le diktat du voyage instagrammable s’ajoute à la culpabilité ressentie par les consommateurs quant à leur empreinte carbone. Le paradoxe est à son comble lorsque voyager de manière écologique devient la clé pour un post séduisant.
Réconcilier valeurs écologiques avec besoins d’évasion et d’aventure passe alors par des compromis, notamment ceux offerts par la micro-aventure.
La micro-aventure se pense comme une alternative au tourisme commun, mettant l’accent sur la découverte et des expéditions inattendues de plus en plus régionales. Les plaisirs simples revalorisés dans notre quotidien par la pandémie sont aussi célébrés par la micro-aventure : randonnée, balade, dégustation, détente et échange…
Au-delà de la vague du « slow travel », la micro-aventure met l’accent sur l’authenticité et l’exclusivité de destinations locales. Moins loin et moins de monde, deux atouts majeurs en période de restrictions sanitaires et distanciations physiques. De plus, en proposant ce changement d’échelle, la micro-aventure se souhaite écoresponsable et répond au désir de redécouvrir le territoire que l’on habite et de se reconnecter à la nature quand on sait que 57% des Français estiment qu’ils rechercheront des expériences plus rurales et éloignées des sentiers battus, pour renouer avec la nature (Booking, 2020).
La proximité devient une valeur clé pour ces expériences et permet au consommateur de développer son sentiment d’appartenance envers une région et ses habitants. De même, le caractère souvent secret ou inédit des destinations participe à la réappréciation du territoire.
Cet engouement pour des micro-voyages participe également à l’émergence du tourisme régénératif.
Tourisme régénérateur : le voyage-action
Alors que le tourisme durable se pense dans la réduction de l’empreinte carbone du voyage, le tourisme régénératif envisage le voyage comme une opportunité à réaliser des actions positives pour l’écosystème et ses habitants mais aussi le voyageur.
Pour les acteurs de ce marché, la question est bien de valoriser l’impact positif qu’ils peuvent offrir à une région et sa population. Les voyageurs deviennent les participants de ces actions positives (dépollution, rénovations, préservation et entretien des ressources naturelles et culturelles, etc..) leur permettant de mieux s'immerger tout en se dépaysant.
Ce tourisme régénérateur permet aux consommateurs de se réconcilier avec leurs valeurs et de se sentir gratifier de leurs expériences, une satisfaction qui dépasse bien le post Instagram. C’est aussi l’occasion pour le consommateur engagé de prendre part activement au bien-être de sa destination, offrant une dimension déculpabilisante au voyage et son empreinte environnementale.
Demain, un élan de revanche ?
À la suite du déconfinement progressif et à la campagne de vaccination, les individus sont déjà en quête de revanche pour profiter pleinement de leurs libertés. L’évasion devient un « besoin impérieux » on parle désormais de « wandermust » où le voyage se conçoit comme un impératif. Demain, ce désir impérieux pour le voyage risque de converger avec les attentes des consommateurs pour des pratiques positives envers l’environnement et ses habitants. Plus que des destinations, ce sont les expériences qui apportent du sens pour le consommateur qui seront idéalisées, ces compromis entre plaisir et actions positives, suscitant l’accomplissement de soi et de ses valeurs tout en profitant d’une immersion dépaysante.
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