Salariés avec des masques

Travail décentralisé, digitalisation et restructuration de la fonction... les enjeux RH 2022

© Drazen Zigic

Du bien-être du salarié à la nouvelle entité professionnelle qu’est le travailleur nomade, restructuration et adaptation seront au cœur des préoccupations des équipes RH cette année.

La crise du Covid-19 a indéniablement changé nos modes de travail. Après deux années de changements dans le monde professionnel, nombre d'entreprises ont dû repenser leur fonctionnement. Les directions et les équipes RH n’ont pas été épargnées et ont été appelées à non seulement s’adapter mais aussi à se réinventer.

Optimisant technologie et culture d’entreprise remote, les équipes RH doivent mettre en place de nouvelles structurations liées à la représentativité des salariés. Il leur est aujourd’hui devenu nécéssaire d’harmoniser la politique de l’entreprise et le respect des procédures dans un cadre de travail hybride. 

Digital nomade et coûts du travail décentralisé

Selon le baromètre annuel du télétravail du groupe de protection sociale paritaire Malakoff Humanis, le nombre de jours télétravaillés était de 1,6 fin 2019, et est passé à 3,6 jours en décembre 20201

Ces chiffres impliquent un nouveau mode de travail qui remet en question la culture du présentéisme. Ainsi dans le sillage de la productivité à distance naquit le « digital nomad ». Ce dernier tire profit des nouvelles technologies en gestion du travail pour exécuter son travail sans lieu fixe. Les équipes de management ont ainsi interêt à s’adapter à ce nouveau profil professionnel afin d’allier productivité et flexibilité et créer un modèle de travail hybride viable et durable. 

Pourtant, ces cadres de travail déconstruits ne présentent pas que des bénéfices et sont propices à de nouveaux dangers. En effet, en 2022, l'heure sera au sens du collectif. Afin de contrer les difficultés de communication, les entreprises doivent redéfinir leurs manières de travailler et faire du collaboratif à distance. Par exemple, Thales SIX GTS France, en partenariat avec la plateforme de pilotage du capital humain Wittyfit, a mis en place un modèle d'organisation collectif en six axes qui s'appuie sur :

  • Le travail d'équipe
  • L'autonomie des équipes
  • La flexibilité des travailleurs
  • L'efficacité des réunions et des déplacements
  • L'optimisation des espaces collaboratifs
  • La compatibilité des outils de travail avec l'exigence des clients.

Au-delà des questionnements autour du sens du collectif à distance, le télétravail, par définition, impose une certaine absence de transition entre le temps de travail et les loisirs. Cette absence peut brouiller les frontières du cadre professionnel et mener à du surmenage ou à une relâche totale. Il conviendra donc au management d'intégrer des applications de gestion de projet synchronisées telles qu'Asana, Slack ou encore les suites Google dans le rythme de productivité de leurs salariés.

Enfin, la délocalisation du lieu de travail implique de s’intéresser à certains problèmes logistiques. Premièrement, l'ensemble des coûts liés au travail devront être reconsidérés : entre matériel informatique, sécurité Web, débit internet et coûts salariaux purs, comment évalue-t-on les coûts de chaque composantes ?  

Selon l’article L1222-10 du Code du travail, l’employeur est tenu de prendre en charge tous les coûts engendrés directement par le télétravail. Il va ainsi assurer la prise en charge des coûts logiciels, d’installation, de paramétrage et d’équipement du salarié. Ces coûts seront donc à prendre en compte dans les budgets prochains.

Organisation et automatisation des processus RH

La technologie a, sans aucun doute, changé nos méthodes de travail en simplifiant notre gestion des tâches et notre communication. Avec le développement du télétravail, le maintien de la motivation et de la cohésion entre les travailleurs, la mise en place des dispositifs d’aides proposés par l’État et l’organisation et gestion de l’activité partielle, l’outil digital est devenu nécessaire à la fonction RH

Selon Talentia2, un éditeur de solutions logicielles spécialisés en RH, 59 % des équipes RH répondantes ont estimé que la digitalisation de leur fonction n’était toujours pas efficace. Dès 2022, il conviendra donc de se pencher sur la structuration et l’organisation de l’automatisation de leurs processus RH. Afin de gagner en efficacité, la digitalisation devra ainsi amorcer le temps et les efforts de travail concernant l'onboarding, les demandes de congés ou encore la création et la mise à jour de documents tels que les contrats de travail.

Pour cela, la fonction RH peut s'appuyer sur des robots RPA qui permettront de traiter des données avec précision ainsi que de générer automatiquement des journaux d'audit. Ces derniers ont donné à des entreprises comme Unilever, qui a dématérialisé sa gestion RH en 2020, la possibilité de faire progresser les objectifs stratégiques en accord avec la direction. Par exemple, des applications comme Heflo, Zenefits ou encore PeopleDoc (utilisé par Unilever France) feront apparaître les données et l'analyse prédictive qui viendront soutenir la stratégie d'entreprise, le développement des talents ou encore la planification de la relève.

S'adapter à de nouveaux profils professionnels

Alors que la génération Z se fraie un chemin dans le marché du travail, elle y apporte son lot de codes et de valeurs. En effet, on assiste à une génération de travailleurs qui voient leur lieu de travail comme un lieu de développement personnel, une étape pour leur émancipation et leur bien-être. Une étude menée par Parlons Travail3, enquête nationale sur le travail en France, rapporte que pour 60 % des répondants entre 18 et 40 ans, une carrière idéale rime avec changer de métier au fil de leur parcours professionnel. 

Ainsi dans l’ère du « Big Quit » – la démission en masse par conviction –, les nouveaux travailleurs tracent un parcours professionnel non linéaire. Toujours selon Parlons Travail, pour 40 % des 41-55 ans, avoir avant tout une carrière sans chômage est primordiale alors que cette condition n’est importante que pour 30 % des 18-40 ans. Ce changement de rapport au travail invite ainsi les équipes RH et et de management à étendre leur spectre d’embauche en s’ouvrant et en s’adaptant à l’arrivée de parcours professionnels non conventionnels.

Alors que les départs en nombre record se multiplient, les entreprises peuvent aussi se pencher sur le recrutement interne afin d'offrir à leurs employés de nouvelles opportunités en phase avec leur activité. Le recrutement interne offre plusieurs avantages dont la réduction des coûts du recrutement, le gain de temps, un capital humain valorisé mais aussi le renforcement de la marque employeur. Par exemple, chez Uber, la mobilité interne est au cœur des stratégies RH avec un taux de recrutement interne de 20 %. Il s'agit donc aux entreprises de favoriser les transitions de carrières internes mais aussi de développer des compétences pour aider à retenir les employés qui pourraient avoir envie d'un nouveau départ.

Par ailleurs, au-delà de la diversité des profils, il conviendra aux entreprises de se pencher sur la rentabilisation de l’intelligence émotionnelle et collective de leurs équipes. Les « mad skills » sont des caractéristiques propres aux personnalités bâties hors de l’académisme, permettant une vision ouverte et hétéroclite de l'activité « travail ». Ces ressources vont ainsi s’ajouter à la valeur ajoutée collective de l’entreprise par le potentiel intellectuel et innovateur de l’employé qui les possède. Il s’agira donc aux équipes RH d’intégrer l’évaluation de ces « mad skills » dans le processus de recrutement.

Une culture d’entreprise de plus en plus inclusive

Depuis une décénnie, les politiques de diversité des entreprises s’inscrivent dans des impératifs de responsabilité sociale et de réputation. En effet, par leur impact direct sur les questions d’égalité sur le lieu de travail mais aussi dans l’accès à l’emploi, les mesures de diversité en entreprise sont vues comme une sorte de miroir moral des entreprises. 

Pourtant, selon une étude menée par Diversiday4, une association nationale d’égalité des chances dans le numérique, en 2021, 86 % des actifs souhaiteraient que leur entreprise s’engage davantage pour la diversité et l’inclusion.
Alors que des appels ont été lancés aux entreprises pour les inciter à créer plus d’emplois incluant les femmes, les handicapés et la neurodiversité, il serait nécessaire de mettre en place des conseils d'administration plus diversifiés et une culture d’entreprise qui irait au-delà de la quête de rentabilité.


  1. https://lecomptoirdelanouvelleentreprise.com/wp-content/uploads/2021/02/2021-040-cne-mh-barometre-annuel-teletravail-2021.pdf
  2. https://www.talentia-software.com/fr/les-principaux-enjeux-de-la-fonction-rh-a-relever-d-ici-2022/
  3. https://www.parlonstravail.fr/portrait/data/parlons-du-sens-du-travail
  4. https://diversidays.com/etude-diversite/
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